Chers camarades,
Décidément, jusqu’au bout Jean-Michel Blanquer se moque des personnels d’éducation !
A 17h ce vendredi, par un mail aux personnels il nous annonce que la rentrée, finalement, se fera à 8h, qu’il n’y aura pas de moment d’échange entre les personnels de 8h à 10h (sur lequel beaucoup d’équipes pédagogiques planchaient déja !), et que l’hommage à notre collègue assassiné, Samuel Paty, se réduira à la minute de silence à 11h précédée d’une lecture en classe de La lettre de Jaurès aux instituteurs sans réel travail préalable avec les élèves.
Beaucoup de collègues sont légitimement choqués par cette manière cavalière de procéder. L’argument « alerte attentat » a bon dos, l’argument sanitaire est risible quand on voit tout le reste (voir ci-dessous):
à se demander clairement si ce n’est pas ce « moment d’échange » de 8h à 10h, qui était une demande forte (minimaliste) des organisations syndicales depuis 10 jours, qui avait été initialement concédé par Blanquer qui a fini par inquiéter, tellement en particulier la question sanitaire redevient primordial et que le Ministère s’inquiétait de laisser un espace de débat et donc de contestation éventuelle de son nouveau Protocole sanitaire. Ce qui serait au demeurant faire injure aux collègues qui n’avaient pas l’intention de mélanger les genres et qui avaient vraiment besoin, dans ce moment de grande tension révélée encore par l’acte barbare de Nice, d’échanger AVANT d’accueillir des élèves qui voudront s’exprimer sur ces sujets délicats.
Dans les collèges et lycées, nous recommandons d’interpeller vos chefs d’établissement en demandant que soit maintenu ce temps d’échange entre personnels, y compris en prévoyant des modalités d’accueil des élèves qui viendront pour le coup, à 8h. En école primaire, malheureusement, ce n’est pas possible.
Dans tous les cas, une telle demande, qui implique qu’il y aura une « rentrée du 2 » ne peut se faire que si les conditions sanitaires sont réunies. Et c’est là le point de vigilance pour la CGT qui déclenchera, à défaut, un droit de retrait collectif.
Quelles conditions sanitaires acceptables pour rentrer lundi ?
Cette rentrée se fait dans des conditions sanitaires spécifiques, notamment dans notre Académie, avec un taux d’incidence du virus qui est un des plus élevé de France ! C’est d’abord cette réalité-là qu’il faut mesurer ! Castex nous a parlé de territorialisation…. Hé bien regardons les données locales !
Alors que le taux d’incidence pour 100 000 habitants est passé à 434,2 au niveau national en moyenne hebdomadaire sur les 7 derniers jours au 27 octobre (moyenne du 21 au 27 octobre), il est de 489,5 dans le Pas-de-Calais et de 806,2 dans le département du Nord, ce qui place ce département en 3ème position nationale après la Loire et le Rhône.
Mais il faut regarder les chiffres à une échelle infra-départementale. A l’échelle des EPCI (Communauté urbaines), Santé Publique France les publie ce vendredi 30 octobre, présentant les chiffres de la semaine 43 (du 19 au 25 octobre) – voir ici :
- la Métropole Européenne de Lille (l’agglomération lilloise pour parler plus simplement) culminait à 939 ! Sachant qu’il ne s’agit là que d’une moyenne ! Des chiffres, déja anciens, ont été donné à la date du 22 octobre: le record absolu (2ème ville de France après une ville de la banlieue de Saint-Etienne dans le département de la Loire) était détenu par Roubaix avec un taux d’incidence de 1135 ! A la même date, Tourcoing était aussi à 953. Et c’était, donc, il y a déjà plus d’une semaine… On sait que l’Hôpital de Roubaix est déjà saturé, et que des malades, il y a déjà 10 jours de cela, étaient transportés vers les hôpitaux d’Amiens et de Montreuil sur Mer. Idem pour Tourcoing.
- Communauté d’agglo de Valenciennes Métropole : 784
- Maubeuge / Val de Sambre : 681
- Communauté d’agglo Porte du hainaut: 665
- Hénin-Carvin: 556
- Communauté Urbaine de Dunkerque: 536
- Communauté du Pays de Saint-Omer: 531
- Douaisis agglo: 518
- Lens-Liévin: 468
- CA du Boulonnais : 430
- La Flandre Intérieure, la zone entre Calais et Boulogne sont aussi supérieurs à 500.
Mais ces chiffres recensent des données d’il y a 8 jours. Or on sait que l’évolution est rapide. Le département du Nord était à 751 en moyenne hebdo sur la semaine 43, il est donc à 806 sur 7 jours glissants le 27 octobre… On peut allègrement augmenter tous les chiffres données précédemment de 50 à 60 points.
Ainsi, car c’est cela que nous cherchons à mesurer, nous sommes bien dans notre académie, sauf à un degré moindre dans quelques territoires où les chiffres sont inférieurs à la moyenne nationale (Cambrésis, Calaisis, Artois surtout le Ternois) dans le cadre d’une « circulation très active du virus », ou en tout cas, nous sommes d’une façon générale et même dans les secteurs les moins touchés, dans le cadre d’une « circulation active du virus », au vu d’une moyenne nationale déjà de toutes façons élevée (sinon on n’en viendrait pas à parler de confinement).
Le ministre Blanquer, qui n’a de cesse de dire « on est prêt » met en avant son « plan de continuité pédagogique » mis en ligne dès le mois de juillet. Voir ici: https://eduscol.education.fr/cid152893/rentree-scolaire-2020-plan-de-pédagogique.html
Deux hypothèses étaient présentées:
– Hypothèse 1 en cas de « circulation active du virus » : cours en présentiel et en distanciel en demi-groupe pour permettre le respect des gestes barrière.
– Hypothèse 2 en cas de « circulation très active du virus »: fermeture des écoles et des établissements et passage en distanciel
Sans que cela soit dit explicitement à aucun moment dans la communication ministérielle (à moins que nous ayons raté une intervention blanquérienne sur BFM…), l’hypothèse 2 ne se déclencherait qu’en cas de fermeture de classe ou d’école/établissement par l’ARS (en cas de cas COVID déclarés importants, le seuil étant 3 cas pour une classe). La CGT conteste cette interprétation et a demandé à la Rectrice la fermeture des écoles et établissements dans les secteurs où le taux d’incidence dépasse les 1000.
Cependant, même si on place la « barre » relativement haute à 1000 (alors que, rappelons nous, un département était classé en « vulnérabilité élevée » dès qu’il dépassait le seuil de 50….), et qu’on considère que, sous cette barre de 1000, nous ne sommes qu’en simple « circulation active du virus » donc hypothèse 1, la moindre des choses qu’on peut exiger de Blanquer est qu’il respecte au moins son propre plan de continuité pédagogique.
Or ce plan évoque au moins la réduction des effectifs de classe: le travail en demi-groupes.
Exigeons des garanties minimale pour rentrer lundi, sinon… droit de retrait collectif !
Cela commence par la revendication du dédoublement des classes (moins de 15 élèves par classe !) pour permettre le respect des distanciations physiques. Cela implique des salles suffisamment grandes bien sûr.En cliquant sur ce lien, vous accéderez à des modèles d’organisation permettant la scolarisation de tous les élèves à tour de rôle.
Notre sécurité sanitaire passe aussi par la mise à disposition de matériel de protection et de désinfection : nouveaux masques pour l’ensemble des personnels (plus de masques Dim !), masques chirurgical de type II pour les personnels vivant avec des personnes à risque si le télétravail n’est pas possible, gel hydroalcoolique en nombre, lingette pour désinfecter le poste de travail. La CGT revendique aussi la mise à disposition gratuite de masques pour tous les élèves.
Les personnels AESH doivent notamment être vigilants sur le respect permanent des distanciations physiques avec les élèves dont ils s’occupent à proximité. Nous exigeons pour eux des masques chirurgicaux de type II. A défaut de tels masques, nous soutenons leur idée de faire une « grève du zèle » en restant à une distance de 1 mètre de l’élève qu’ils/elles accompagnent. [En cas, bien sûr, d’absence de droit de retrait collectif auquel ils doivent participer].
D’autres mesures sont prévues dans le Nouveau Protocole sanitaire (cf. pièce jointe), qui doivent être respectées: étalement de la rentrée des élèves, récréations décalées, protocole d’organisation de la restauration scolaire avec distance d’1 mètre entre les élèves, organisation du flux des élèves dans l’établissement en attribuant une salle par classe (sauf salle spécifique ou atelier), aération fréquente (toutes les deux heures au moins) ce qui implique la possibilité d’ouvrir les fenêtres…
Ce sont les conditions minimales pour que la rentrée se déroule dans des conditions sanitaires à peu près acceptables. En cas de non-respect des règles imposées par le protocole sanitaire, nous devons faire valoir notre droit de retrait.
En particulier la question du nombre d’élèves par classe est essentielle. Des remontées que nous avons de plusieurs établissements montrent qu’il est possible de mettre en place le travail uniquement en groupes à effectifs réduits par dédoublement des classes. Certains le font, pourquoi pas tous !
La « continuité pédagogique » ne doit pas se faire au détriment de notre santé, de celle de nos proches et de nos élèves. Pour information, nos voisins belges ont décidé de repousser la rentrée scolaire au 15 novembre, et de travailler ensuite par demi-groupes avec du présentiel et du distanciel. Ce n’est pas la panacée ce « mixte » mais nous savons aussi que cela s’organise en exigeant que ce ne soit pas les mêmes enseignants qui soient en présentiel et en distanciel et cela est tout à fait réaliste au vu du nombre de collègues vulnérables ou vivant avec une personne vulnérable qui travaillent ou peuvent travailler en distanciel.
Comment exercer ce droit de retrait collectif ?
Nous vous proposons d’adresser la lettre ci-jointe à votre chef d’établissement ou IEN. Il s’agit d’une alerte que nous adressons ce samedi matin à la Rectrice et aux DASEN du Nord et du Pas-de-Calais (en lien ici). Un droit de retrait doit toujours être précédé d’une alerte qui pose des conditions.
Les conditions sont claires: elles doivent être résolues pour lundi matin.Ce n’est pas de notre fait si le Ministère n’a donné aucun temps de préparation, ni n’a reporté la rentrée ne serait-ce que d’un jour, comme l’avaient demandé les organisations syndicales. Il est également hors de question d’attendre par exemple que tout soit prêt « pour le 9 novembre » (la limitation du brassage des élèves «doit être pleinement opérationnelle au plus tard le 9 novembre 2020» est-il noté dans le Protocole !)
Il convient donc de communiquer rapidement, par mail, puisque, de toutes façons, tout le monde est pendu à ses mails en ces journées particulières de préparation de « montée au front »:- mail au chef d’établissement ou à l’IEN/+directeur d’école en demandant la mise en œuvre des mesures évoquées dans la lettre jointe- mail aux collègues pour annoncer la démarche et dire clairement qu’en cas de non application vous exercerez un droit de retrait collectif
Le jour J, il faudra adresser à votre chef d’établissement ou IEN/+ directeur d’école, une lettre collective signifiant que vous exercez votre droit de retrait. (voir lettre modèle ci-jointe : pour le second degré, pour le premier degré ), en nous en adressant une copie.
Remarque: « droit de retrait » ou grève ?
Il est possible que l’administration conteste que vous soyez en « droit de retrait » et vous déclare gréviste. Dans tous les cas, un préavis de grève existe pour vous couvrir et pour ne pas vous placer dans l’illégalité. Il faut être prêt à assumer cette possibilité. Qu’importe au fond. Mais l’essentiel est, en terme de communication vis à vis des familles et de la presse, de maintenir qu’il s’agit d’un droit de retrait lié aux conditions sanitaires et que ce droit de retrait s’exerce précisément dans l’intérêt de tous, y compris des élèves.
Dernière remarque spécial 1er degré:
Le droit de retrait est une mesure qui n’est pas soumise à l’obligation des 48h préalable pour le dépôt d’une DIG (déclaration d’intention de grève). Il peut y avoir par contre des interrogations par rapport à la nécessité de la surveillance des élèves: c’est pourquoi le déclenchement du droit de retrait doit se faire à 8h20 au plus tard avant même l’accueil des éleves. Si jamais des personnels jugeaient, au vu du timing très court, qu’il convient de s’accorder une journée supplémentaire, permettant par exemple une concertation entre collègues ce lundi et permettant une meilleure information des parents, bien entendu vaut mieux décaler le déclenchement de ce droit de retrait collectif au mardi, mais nous insistons sur la nécessité de réagir très vite, car après… on s’habitue à tout et on finit par laisser passer l’inacceptable…
N’hésitez pas à nous interroger pour toute question complémentaire liée à ces préconisations.
Bien syndicalement,
William ROGER Secrétaire Général CGT Educ’Action 59/62